Construction des marchés urbains : Une polémique latente à craindre

Coût de location : Encore du mystère

Horaire de fermeture des marchés : ça grogne déjà !

Un risque d’exclusion de plus en plus inévitable

Ça y est ! Les nouveaux marchés urbains érigés par le gouvernement de la Rupture s’apprêtent à accueillir leurs occupants alors que celui de Cadjèhoun est déjà opérationnel. Du plan architectural à la bâtisse proprement dite, tout est si beau qu’on ne peut que s’en réjouir. Seulement, toute analyse faite, une polémique couve.

Tels des champignons, de nouveaux marchés dits « urbains » et répondant aux standards modernes sortent des sols dans la capitale économique et dans plusieurs localités du Bénin. Il est annoncé la mise en service de 20 nouveaux marchés sur les 35 prévus d’ici décembre 2024. Tout semble quasiment prêt pour que les commerçants, autrefois contraints de déguerpir les lieux, y retournent. Seulement à quel prix cette fois-ci ? Quel sera le coût de la location désormais dans lesdits marchés ? Cette question mérite bien d’être posée et tout laisse entrevoir que la décision du gouvernement à propos ne devrait pas laisser indifférente, l’opinion publique.

D’ailleurs, le mystère continue d’être entretenu autour du coût des loyers au niveau du gouvernement. Interrogée dimanche, 16 juin 2024 sur la question sur Bip radio, la Directrice générale de l’Agence nationale de gestion des marchés (Anagem), Eunice Loisel Kiniffo a laissé entendre ne pas pouvoir annoncer un montant alors que les marchands occupent déjà les emplacements dans ces marchés dits urbains. “…nous avons fait des propositions qui ont été soumises à l’autorité et le Chef de l’Etat et son gouvernement vont statuer là-dessus et ça ne tardera pas“ a-t-elle confié.

Si cette réponse montre bien une certaine réticence des autorités compétentes à en parler depuis de longs mois, une chose paraît pourtant évidente : les marchands devront débourser plus qu’autrefois. Le gouvernement craint-il une polémique latente ? De toute façon, il faudra y faire face tôt ou tard. Selon l’invitée de Bip radio, le plus important est de remettre tous les marchands dans les marchés, affirmant que les marchands relogés ne paient encore aucun centime. Une approche qui laisse perplexe et suscite moult interrogations. Quel sort sera réservé aux marchands déjà relogés et qui ne pourront s’acquitter de la somme demandée comme loyer et redevances ? Seront-ils expulsés finalement du marché ? D’ailleurs, elle n’a pas manqué de préciser que des charges liées à l’entretien, la sécurité, l’électricité et autres incombent aux marchands.

D’importants investissements ont été consentis par le gouvernement et il faudra rentabiliser. Ceci devrait impacter le coût de location.  Bâtis en charpente métallique à l’allure pyramidale, lesdits marchés seraient adaptés aux standards modernes en matière de centre commercial dans l’optique d’offrir des espaces modernes pour un commerce dans des conditions sanitaires appropriées. D’architecture de type R+1 et disposant d’un vaste hall d’entrée et des hangars tout autour du bâtiment, ces marchés disposent de places confortables avec des capacités d’accueil doublées voire triplées. Le coût de réalisation de ces marchés qui s’étendent sur environ 92000m2 serait estimé à 32 milliards de FCFA. Un important investissement et il n’est pas à exclure que le loyer connaisse une augmentation. Dans un contexte actuel de morosité économique et de cherté de la vie, plusieurs commerçants, faute de moyens et de capital conséquent, pourraient bien renoncer à s’y installer. Et on pourrait y voir des marchés pour les plus nantis.

Risque de hausse des prix des marchandises…

En réalité, le coût du loyer ainsi que les autres taxes qui pourraient être perçues dans lesdits marchés impacteront, sans nul doute, les prix des marchandises. Des frais élevés de loyer induiraient une augmentation des prix des marchandises. La conséquence qui en résulterait pourrait bien être la mévente. Les usagers préfèreraient bien s’aligner devant les étalages des quartiers que de fréquenter lesdits marchés. Les réalités n’étant pas les mêmes, les prix ne devraient pas également être les mêmes. De la probable mévente pourrait se dégager un risque de loyers impayés et d’exclusion du marché. Qu’en sera-t-il alors du sort des pauvres commerçants qui menaient leurs activités dans ces marchés ordinaires ? La question reste toute posée.

Les horaires d’ouverture et de fermeture : l’autre polémique…

Selon la Directrice générale de l’Anagem, les marchés ne seront ouverts aux usagers qu’à partir de 09h et aux marchands à 08 h et seront fermés aux usagers à 19h alors que les marchands ne peuvent y rester au-delà de 20 heure. Sous d’autres cieux, une telle option aurait été fortement saluée. Seulement qu’au Bénin et précisément dans la capitale économique, les marchés sont généralement ouverts déjà tôt le matin voire à l’aube et ce, jusqu’à tard dans la nuit. Le marché Dantokpa reste, par ailleurs, animé sans arrêt. Ainsi, pour ceux qui travaillent jusqu’au-delà de 19h, ils devront avoir du souci à se faire. En effet, cette décision pourrait également bien fait jaser étant donné que souvent, les marchés sont davantage animés les soirs après 19h. La plupart du temps, l’on profite du retour de service pour faire des achats. Des voix pourraient s’élever sous peu.

Les enfants hors du marché…

Présente à la cérémonie d’ouverture du marché de Cadjèhoun, la ministre des affaires sociales et de la microfinance, Véronique Tognifodé n’a pas manqué d’insister sur la présence des enfants dans le marché. Et pour renchérir, la Directrice générale de l’Anagem a laissé entendre sur Bip Radio que la présence des enfants n’est pas tolérée dans ces marchés sauf si ces derniers sont juste de passage pour voir leurs parents. S’il faut saluer cette approche visant à combattre le travail des enfants, il faut souligner que généralement, durant la période des vacances, les enfants préfèrent aider les parents et surtout se faire également quelques sous.

Ceci ne devrait pas les empêcher de jeter un coup d’œil à leurs cahiers chaque fois qu’il n’y a pas de clients à servir. La vie n’est pas si rose à tous les niveaux et la présence d’un enfant au marché, en train d’aider sa maman par exemple, ne devrait pas être toujours perçue comme une exploitation. Si la directrice générale de l’Anagem a confié avoir renvoyé des enfants du marché de Cadjèhoun, il est évident que, pour défaut de prudence et de diplomatie, cette injonction, inscrite dans le règlement intérieur du marché pourrait également fait jaser. En attendant, les belles maquettes font le tour des réseaux sociaux et tout le monde s’en réjouit.

A.B

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Source : Matin Libre

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